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Sans se retourner

Le novillero dacquois Louis Husson a décidé dimanche de se retirer du toreo. Un geste pensé, courageux et rare, que Maurice Berho a salué sur Facebook par un très beau texte que nous avons souhaité traduire et proposer à tous…

 

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« Ce ne sont pas les toros d’aujourd’hui qui sont en cause, c’est dans ma tête que ça se passe… Je me suis rendu compte que ça me demandait de gros efforts pour m’accrocher, et que malgré tout, je ne me régalais pas, je n’avais pas cette adrénaline qui te donne envie de tout donner ! J’étais en train de travailler, et la tauromachie n’est pas un travail. C’est une passion et un art » Louis Husson

Ces paroles du jeune français, prononcées juste après avoir renoncé à ses rêves, respirent la sincérité. Louis se croise vers la corne contraire d’une réalité imparable. Et là c’est au plus profond de l’être que l’accident se ressent. L’âme en morceaux, les rêves en lambeaux. Cette blessure-là, c’est une des plus difficiles à guérir. On toréé comme on est, et Louis Husson, en se coupant la coleta, l’a démontré une fois de plus sur le sable d’Arnedo. Transparent et sans arrières pensées, traversant la piste pour son dernier paseo, il rêve encore, vêtu de lumière pour la dernière fois, de gloire, et pourquoi pas de ce Zapato de oro tant désiré. Mais le noir est sorti en piste, bourreau intraitable, qui confirme à Louis ce qu’il a senti toute la saison. Peu à peu, sans trêve possible, la foi en lui s’évaporait.

« Lorsque tu n’es pas capable de te montrer à la hauteur, et que tu sais que d’autres, pleins d’espoir, se mordent les doigts parce qu’on ne leur a proposé aucune place, et toi tu es là… Je me dois d’être honnête, si je ne suis pas fait pour ça, je ne suis pas fait pour ça ! Que mes compagnons profitent de mes toros pour triompher, et voilà tout ! Maintenant, tout ça n’est plus pour moi. C’est fini, et c’est comme ça ! »

Comment exprimer plus profondément le respect que l’on sent pour une profession, et pour ses compagnons d’arène ? Husson ne sait pas mentir, ni dans la vie, ni dans l’arène. Il s’est toujours montré capable de tenir à distance les sirènes, et aucun beau parleur ne réussit jamais à lui embrouiller l’esprit. Louis poursuit des études supérieures irréprochables, remarquables. Comme sa courte carrière de torero. Il fut comme l’enfant prodige de la tauromachie française, présent dans le cœur des aficionados de son pays depuis ses débuts de becerista, où il gagna le concours de Canal Plus.

A l’instant même où il se retire, débute pour Louis une nouvelle vie. Fin du chapitre dans lequel il mit sa vie en entier à l’épreuve de la dureté de la corrida, sachant que chaque faux pas pouvait être le dernier. Il reconnaît avoir mûri comme homme et, plus important, il a su donner un sens légitime aux mots courage, humilité, passion.

Bonne chance, Louis, et merci ! L’arène de la vie t’attend, et n’oublie jamais que la tauromachie est la plus belle des métaphores de l’existence…

Maurice Berho